Éric frotte une bague sur une petite pierre de touche, avant d’appliquer un acide de titrage sur la trace laissée par l’objet en or. Cette méthode lui permet de déterminer la pureté du bijou. Il examine ensuite la réaction : si la trace change de couleur ou s’atténue, il change d’acide. Si la trace ne bouge pas, il s’agit du bon carat. Ne reste plus qu’à peser la bague pour fixer le prix de rachat. Dix grammes à 18 carats ? 100 euros net. L’affaire est réglée. En quelques minutes, ce racheteur peut vous débarrasser de tous vos anciens bijoux de famille. Éric Masson « exploite le filon » depuis le mois de décembre. « Cela s’est fait un peu au hasard. J’ai un ami bijoutier dans le Doubs qui avait un petit local. Il ne savait pas quoi en faire, alors il a créé une boutique de rachat d’or. ça a de suite bien marché », raconte le jeune professionnel qui n’avait auparavant aucune expérience en bijouterie.

+ 300 % en 10 ans pour l’once d’or

Comment expliquer le succès de ces boutiques disséminées un peu partout dans nos villes ? L’or, valeur refuge par excellence, atteint aujourd’hui des sommets. En 10 ans, l’once d’or (31,10 grammes) a augmenté de plus de 300 %. Le lingot d’or se négocie à 26 200 euros. Et selon les spécialistes, le cours devrait encore augmenter d’ici la fin de l’année. En revanche, le besoin en argent frais n’est pas la motivation première des vendeurs. « Sur dix clients, seulement un va vraiment avoir besoin d’argent. Généralement, j’ai affaire à des femmes sans problèmes financiers mais qui souhaitent se débarrasser de bijoux », affirme Éric. C’est le cas de Françoise, la trentaine. « J’avais de vieux bijoux que je ne mettais plus et qui n’avaient aucune valeur affective ; j’ai préféré les vendre plutôt que de les garder dans un tiroir », témoigne-t-elle.

« Le phénomène va-t-il durer ? »

Bruno Fontaine, artisan bijoutier depuis 30 ans à La Seyne, suit le phénomène avec un brin de scepticisme. « Acheter de l’or, c’est particulier, très réglementé. Il faut tenir un livre de police. Je n’achèterai pas à quelqu’un que je ne connais pas. Je préfère refabriquer un bijou, faire quelque chose de plus moderne. Je suis un peu contre le principe, mais je n’ai aucun problème avec ceux qui font ça. Au contraire, si ça marche, tant mieux. Je me demande juste si le phénomène va perdurer », explique le joaillier. « C’est pour ça que j’essaie de fidéliser mes clients, de leur apporter des bons conseils, de les rediriger vers un bijoutier si la bague est sertie de belles pierres », reconnaît Éric. Pour l’instant, la mine ne semble pas être près de se tarir.